Provence-Alpes-Côte-d'Azur

Saverio Lucariello

Né⋅e en 1958, décédé⋅e en 2023

Vit et travaille à Piffonds, Marseille et Paris

Saverio Lucariello est un artiste hermétique de cette nature. Il maîtrise pour sa part les vertus ésotériques de l'idiotie. Ainsi multiplie-t-il les autoportraits en mage kitsch ou en fantôme monté sur brouette (Nomadisme glouton et boulimique), s'essayant, dans des tenues folkloriques à tendance disco, à des manipulations d'objets ou à des discours d'allure cabalistique. On en est à ce stade de l'appréhension des formes et des symboles où la tentation opérative se fait jour. Le mage Lucariello, faisant l'économie d'une théorie ou d'une initiation, se lance de manière sauvage dans une alchimie du quotidien. Bouts de tissus, outils de jardin, ustensiles de cuisine ou, ailleurs, charcuteries diverses, sont arbitrairement envisagés comme autant de pentacles magiques (Romantique nocturne et mélodique). Et c'est de son oeil goguenard ? qui n'est pas sans rappeler celui de Peter Sellers dans The Party de Blake Edwards ? que le chamane d'origine napolitaine, affublé de ses robes-toges acrylique, observe les manifestations que son fluide saura produire à plus ou moins long terme. Mais peu de choses adviennent. Seuls demeurent suspendus, en chorégraphie, gestes immotivés, propos incohérents, liturgie baroque (Affrontement topographique). L'alchimie terroriste de Lucariello est une science de musée Grévin, galerie de figures stylisées, figées dans leurs postures comme autant de formules interdites de conclusion, une alchimie absolue qui fait retour à la rigueur du burlesque, ouvre sur l'idiotie comme intelligence supérieure du poétique.

Jean-Yves Jouannais, extrait du texte Les deux Hermès, in cat. Saverio Lucariello, Images En Manoeuvres Éditions, Marseille, 2000