Philippe Fangeaux
Né⋅e en 1963
Vit et travaille à Marseille
Philippe Fangeaux assemble des éléments de réalité qui devraient s'exclure mutuellement. Il nous invite donc à une lecture de chocs expressifs et d'articulations brutales qui finissent par déterminer les conséquences d'une réalité troublée sur laquelle on n'a pas de prise décisive, qui ne cesse de fuir tout en se laissant étrangement poursuivre. Il se dégage de sa peinture une certaine griserie.
L'imaginaire s'engouffre dans le réel, l'aère, l'irrigue, lui communique une part de son instabilité. De l'un à l'autre, s'opère un constant passage, et comme une confusion délestée de toute pesanteur. Ces deux pôles produisent des éclats de récits qui n'arrêtent pas de s'entrecroiser, nous sollicitant là où des propositions et des intrigues nous convoquent et nous attendent, non pas dans le sens d'un piège ou d'une bifurcation quelconque, mais d'un itinéraire arborescent sous l'emprise de forces multiples dont nous avons quelques difficultés à saisir d'emblée l'enjeu et les motivations.
Philippe Fangeaux enclenche ainsi un mécanisme de mise en scène de modèles fictionnels et autobiographiques qui participent à la même effervescence car constamment travaillés par un besoin de confrontations. Ce qu'il cherche à accomplir est une sorte de plongée inlassablement répétée dans ce jeu de miroirs et d'échos pour en rapporter tout ce qui peut encore faire image. Sa peinture ainsi devient plurielle, une entité dont les éléments constitutifs ne s'unissent pas, diffèrent sans s'annuler, sans se subordonner les uns aux autres, inscrivant la possibilité d'un tout dont les parties coexistent dans leurs différences, dans une incompatibilité positive. Elle va et vient, retourne sur elle même, et cherche moins à progresser vers une conclusion nette et définitive, qu'à faire apparaître l'existence d'un centre inconnu.
Didier Arnaudet, extrait du catalogue abbadia Philippe Fangeaux, Le Carré Bonnat - Bayonne, 2002