MÀJ
Auvergne-Rhône-Alpes

Mengzhi Zheng

Né⋅e en 1983

Vit et travaille à Lyon et Paris

Enfant, je vivais dehors. Le village chinois où j’ai grandi était traversé d’eaux et de montagnes, ce que le mot "paysage" désigne en chinois. À sept ans, Paris m’a fermé ses portes : espaces étroits, appartements empilés. Cette rupture a façonné ma perception de l’espace. Plus tard, étudiant en art, un retour au village m’a révélé un autre vide : la mutation avait effacé les lieux, leur âme avait disparu. Depuis, mon œuvre poursuit la recherche d’un "chez-moi possible", toujours à réinventer.

À l’atelier, je travaille avec ce qui est là : fragments de meubles, chutes de bois, carton, papier. Matériaux porteurs d’usages et de mémoires, que je révèle au lieu de les effacer. Leur réemploi est une manière d’habiter mon monde. Intuition et spontanéité guident mes gestes : sans dessin préalable, les formes surgissent dans l’urgence, assumant leur précarité. Dessin et collage obéissent à la même logique d’assemblage direct. Ainsi apparaissent des intentions spatiales, des espaces-objets ouverts, à la frontière entre sculpture et architecture, inarchitectures et maisons d’âme.

Dans l’espace public, mes visions naissent de l’écoute du lieu. Elles s’inscrivent dans une tradition d’interventions in situ et dialoguent avec les architectures expérimentales qui bousculent les normes. Mes dessins dans l’espace deviennent catalyseurs de rencontres. La couleur n’habille pas, elle active : elle révèle les volumes, intensifie les vides, capte le regard, donne souffle à l’espace.

Dans un monde saturé de fonctions et d’objets normés, ma sculpture résiste à la standardisation architecturale. Je ne fais pas l’éloge du bricolage : je restitue une valeur à ce qui a été rejeté, en le transformant en espace de projection. Créer le non utile, c’est redonner au vide sa puissance : circulation, souffle, mouvement. L’œuvre est rupture, ouverture, lieu de projection.

Atelier ou espace public : même conviction. Ouvrir des visions d’espaces et des rêves d’architectures. Des lieux de liberté et de traversée, où chacun peut déposer un fragment de soi. Les enfants, par leur regard direct, sont souvent les premiers à les reconnaître ; mais chacun peut y retrouver l’écho d’une mémoire intime, s’y retrouver un instant, comme dans un paysage intérieur.

© Adagp, Paris